Tournée générale (Faïza et Mahalia)

Besoin de se défouler ? C’était une manière comme une autre de se défouler, pensait l’algérienne. Aller boire à la Citadelle accompagnée d’une parfaite inconnue. Ce n’était pas vraiment dans les habitudes de Faïza de faire ceci, elle n’avait pour ainsi dire jamais tenté l’expérience ou presque. Les rares fois où elle était venue à la Citadelle avaient été pour faire du repérage, donc son mobile était intéressé. Là, elle n’avait rien d’autre à faire que de.. Profiter ? Cela lui était quasiment inconnu. Pour se défouler, Faïza employait généralement des méthodes moins conventionnelles. Elle se laissait aller à la violence avec les prisonniers récupérés par les autres loups. C’était ça qui la défoulait. Mais bon, la Bêta était ouverte alors pourquoi pas ? Puis encore, si cela lui permettait de croiser Alyce sans que ça ne soit au milieu d’un bain de sang, pour une fois. Elle ne tardèrent pas à rejoindre la Citadelle après avoir pénétré les souterrains.

Elle avait bien évidemment eu à laisser sa machette aux gardes de l’entrée, Faïza détestait ça, mais bon c’étaient les règles..

Faïza se mit à penser à ce que venait de dire la louve qu’elle accompagnait. Elle ne connaissait presque personne à l’usine. Cette jeune fille était là depuis au moins un peu plus d’un an, désormais. Quelque chose comme ça, c’était assez surprenant qu’elle ne s’y soit pas faite au moins un ou deux amis, si on pouvait appeler ça comme ça, chez la meute. Si Faïza l’avait su elle aurait peut-être tenté une approche plus tôt, afin de briser la glace et voir si elle était si peu sociable que ça. Enfin bon. Pour le moment les deux femmes venaient de s’installer à une table et c’est assez rapidement qu’un serveur s’approcha d’elles pour prendre leurs commandes. Pour le coup Faïza était bien embarrassée, elle qui ne buvait jamais d’alcool. Son idée initiale avait été de commander la même chose que la louve, histoire que ça soit rapide et qu’elle ne mette pas trop longtemps à se décider. Mais lorsque celle-ci demanda cinq shots, Faïza abandonna vite ce projet pour hausser les épaules et demander au serveur un verre de rhum. L’une des seules choses qu’elle buvait par le passé en de quelques occasions. Un peu plus tard, la fille se présenta enfin, son prénom était Mahalia. Cette dernière lui proposait une cigarette. L’algérienne se laissa tenter, elle avait fumé pendant quelques années avant l’apocalypse mais avait décidé d’arrêter du jour au lendemain. Comme elle n’était pas prête de mourir d’un cancer, la Bêta en attrapa une du bout des doigts au même titre que le briquet. Ceci fait, elle ne prit qu’une première petite bouffée, afin de se remettre dans le bain doucement.

- Eh bien enchantée. rétorqua donc Faïza, elle regarda calmement à droite et à gauche, d’autres personnes étaient là, faisant comme elles, à attendre leurs verres, Alors c’est comme ça que la plupart des gens font pour se relaxer.. Je me souviens, il y a quelques années de ça je trouvais que ce genre d’endroits n’étaient rien de plus que des taudis et des nids à ivrognes.. C’est toujours le cas mais aujourd’hui c’est quasiment du cinq étoiles.

Elle avait pensé à haute voix, mais c’était aussi pour discuter avec cette louve qu’elle ne connaissait pas. Elle avait le sentiment de se retrouver, effectivement, quelques années auparavant. Comme si elle sortait avec un collègue de travail et qu’il fallait absolument éviter de parler boulot.. Sauf que là, c’était de la Meute dont il fallait éviter de parler.

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Faïza avait regardé un peu les alentours du bar, pas d’Alyce à l’horizon. En même temps ce bar ne devait pas vraiment être son endroit de prédilection, peut-être que certains des gens qui lui donnaient des missions se trouvaient là cependant. Bon. En attendant, elle n’avait pas non plus réagi au sourire de Mahalia quant à sa remarque. Faïza ne l’avait tout simplement pas compris, il ne semblait pas être une moquerie, c’était tout ce qui comptait. Quelques instants plus tard, ce qu’avaient commandées les filles était arrivé et le serveur ne s’était pas donné le mal de rester pour savoir si elles voulaient autre chose, tant mieux. Ce fut aussi au tour de Mahalia de prendre la parole pour répondre à ce que Faïza avait dit précédemment. Bizarrement, cette dernière ne pouvait qu’acquiescer. La définition de la détente ces dernières années avait beaucoup changée.. Autant Faïza ne touchait absolument pas aux drogues et ne buvait que très rarement, autant la violence était l’une de ses principales sources de relaxation. Les tortures de prisonniers, de survivants isolés et faibles croisés dans les ruines. La nouvelle Alpha ne pouvait presque plus s’en empêcher, chose qui devenait presque addictive, à un tel point que ça en devenait handicapant. Certains jours elle ne pensait qu’à ce qu’elle allait bien pouvoir faire subir à son prochain..

Mahalia évoqua subitement le groupe des Élitistes, à la surprise de son interlocutrice. Mais elle n’avait pas forcément tord, même si elle respectait énormément ce clan belliqueux ayant su se faire connaître et s’établir au coeur de la capitale, ils avaient un certain niveau de confort qui frisait le ridicule d’après ce que savait Faïza. Elle jalousait presque les douches chaudes. Aussi deux élitistes avaient l’air de se trouver là, une ou deux tables plus loin à peine. L’échange de regard ne fut pas tendre, l’un des deux hommes avait un long manteau noir, un regard perçant, quelques bagues et chevalières aux doigts et les cheveux teint d’une couleur argentée. L’autre avait une capuche relevée, l’air malsain. Peu importait à Faïza, au sein de la Citadelle rien ne pouvait leur arriver, par contre une fois sorties, elle garderait l’oeil ouvert. Au cas où.

Alors qu’elle venait de prendre une gorgée de son verre, elle releva les yeux vers Mahalia qui lui avait posé une question personnelle. Anodine, une façon comme une autre d’entamer la discussion. Par chance pour la jeune fille Faïza n’avait aucun problème quant à évoquer son passé qui était au final plutôt banal par rapport à d’autres personnes.

Elle reposa son verre sur la table alors que Mahalia prenait son premier shot sans sourciller.

- Je ne vivais pas dans Paris même, mais oui j’ai toujours été dans les environs. Puis en grandissant, j’y ai travaillé. Je n’ai jamais vraiment eu envie de bouger, même petite, partir en vacances ne me disait rien.. On peut dire que je suis casanière au possible. Et toi ? Parisienne depuis toujours ? Ou alors ici par défaut plus qu’autre chose ?

Les deux étaient possibles, certaines personnes s’étaient juste retrouvées bloquées dans Paris à cause de la fin du monde, à cause des zombies, des bombes. Elle pensait à Daniel qui n’avait jamais pu revoir l’Espagne, sa femme ou ses enfants à cause de ça et de son ancien travail de routier. Peut-être que Mahalia n’était pas d’ici, elle non plus.

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