Cache-Cache(s)
De lourds pas résonnaient dans la cage d’escaliers, le calme ambiant étant le catalyseur primaire de cette agression sonore. La personne qui en était à l’origine ne se pressait pas, descendant d’un pas nonchalant, marche après marche, en prenant son temps. Il était assez dur d’en distinguer l’auteur, plusieurs pièces de tissus -principalement des draps- ayant été clouées au mur, seuls quelques rayons de soleil ayant décidé de jouer en soliste avaient réussi à traverser cette muraille de coton. Par ces fins rayons, on pouvait apercevoir des brins de poussière virevolter çà et là à leur guise, dans une danse sans fin.
Arrivé au pallier du premier étage, la personne se stoppa nette. Il porta la main à son dos et en sorti une machette d’un fourreau improvisé, le genre qu’on trouvait dans tout bon magasin de bricolage. Si vous voyez les dégâts que celle-ci fait sur un tronc d’arbre, imaginez sur un crâne en décomposition depuis plusieurs mois. Grâce à la lame de son arme, il se dégagea un petit angle de vue qui donnait en contre-bas en poussant légèrement le tissu pendu.
Quelques infectés, rien d’infranchissable. Même s’il est vrai que rester sur ses gardes est le meilleur moyen de voir le soleil se lever un jour de plus, la plupart de ces charognes étaient plutôt du genre à se nourrir par opportunité. Certains, restaient là, assis toute la journée, attendant qu’un pauvre hère tombe dans leurs bras. C’était la dure loi de ce monde.
Il continua son périple en descendant les dernières marches qu’il lui restait à franchir. En ouvrant doucement la massive porte en chêne, il passa la tête pour s’assurer que la voie était libre. Le changement de luminosité lui fît froncer les yeux quelques secondes, le temps de s’y habituer. Gauche, droite, rien. Une fois dehors, il referma la porte avec la même délicatesse utilisée pour l’ouvrir. S’assurant qu’il ne courait aucun risque, il posa son barda sur une vieille « clio 4 » abandonnée au milieu de la rue. Après quelques secondes de fouille, il en sorti un petit appareil photo polaroid et un feutre noir. Après avoir pris une rapide photo de la façade, il inscrivit alors l’adresse à l’arrière de celle-ci : 16 Rue Lacharrière, ok.
Voyant qu’il commençait à attirer l’attention, il rassembla ses affaires, une fois le sac sur le dos et machette en main, il reprit sa route, en agitant la photographie prise à l’instant pour accélérer le processus de développement de celle-ci. Il n’avait pas vraiment de destination à rallier, il n’avait pas vraiment de chez lui en réalité. Il en a eu un par le passé. Il faisait même partie d’un groupe, c’est pour dire : Les Humanistes.
Mais il n’a pas pu rester dans cette communauté après que… Enfin bref, peu importe, ce n’est pas très intéressant après tout de ressasser le passé comme ça. Néanmoins, il garde une assez bonne relation avec la plupart de ces membres malgré le fait qu’il n’en fasse plus partie. Et puis comme ça, il peut aller où il veut, non ? La liberté quoi.
D’ailleurs c’est marrant, lui qui est originaire du sud de la France, les seules fois où il a pu visiter la Capitale, c’était pendant la marche des morts. Quelle ironie. C’est plus tellement la meilleure époque pour du tourisme.
Les minutes avaient beau passer, le décor, lui, se suivait et se ressemblait. Ruines, ruines, zombies, zombies, ruines, zombies et… Ruines ! C’était déprimant, ça oui. Les minutes devinrent des heures, et le jeune continuait de marcher, encore et toujours, sans but, se laissant guider par ses envies -et par les rues infestées de morts-vivants. - Il remontait le boulevard Voltaire depuis quelques minutes et avait déjà franchis le « Bataclan » depuis un bon petit moment déjà, qu’il décida de faire une pause.
Il n’avait pas bu depuis des heures et ce genre de petit trajet était plutôt éprouvant quand il fallait escalader, se faufiler et déplacer des choses. De plus, aujourd’hui il faisait beau et malgré la légère brise qui soufflait par petite rafale de temps en. Il attrapa sa bouteille et en bu une gorgée et il s’en versa un peu sur la tête, faisant ainsi tomber sa température corporelle.
Alors qu’il était prêt pour se remettre en route, quelque chose attira son attention un peu plus loin. Quelque chose bougeait au niveau d’Oberkampf, mais impossible pour lui de dire ce qu’il en était. Il attrapa son arme fermement par le manche de celle-ci et s’approcha discrètement de la bouche de métro, véritable piège mortel de nos jours. D’un pas léger, il leva sa machette pour parer à toute éventualité et surtout pour être le premier à frapper. S’approchant à pas de loups, il arriva devant l’entrée du métro… Et rien.
Quoi ? Oui, oui, rien, nada, que dalle. La tension retomba d’un coup, c’est alors qu’une ombre se jeta sur Alexandre. Le jeune homme ne pu retenir un petit cri de surprise et son pied butant contre la première marche des escaliers, il tomba en arrière. Sur le dos, il pencha sa tête sur le côté pour ne voire rien d’autre qu’un chat, l’épiant à quelques mètres de lui.
- Et beh alors, le chat ? Tu n’as pas honte de me faire peur comme ça ? Lui lança le militaire. J’aurais pu te transformer en gigot, t’es au courant de ça ? Pour seule réponse, le chat lui feula dessus et s’en alla à toute vitesse. Et en plus tu t’en vas comme ça… Ce n’est pas comme si… je…
C’est alors que l’ex-soldat senti une pression sur sa botte. En reposant son regard sur l’escalier, un groupe d’infecté commençait à monter religieusement les marches, n’ayant pu avoir à manger quelques minutes plus tôt, il pouvait à présent se rabattre sur une cible beaucoup plus grosse. Alex attrapa alors son arme, mais il se rendit vite compte que dans sa position, l’allonge n’était pas nécessaire pour atteindre le crâne de l’infecté.
Il décocha alors un coup vif dans le poignet de celui-ci qui se décrocha sans grande difficulté du reste du corps. Sans doute sous l’effet de l’adrénaline, le jeune se leva d’un bond, reculant de quelques pas, la main désincarnée de la créature toujours accrochée à sa botte.
Depuis l’obscurité du métro, vestibule des enfers, le danger guette. Il allait affronter ce qui lui faisait le plus de peine en ce monde, ceux qui n’avaient pas eût la chance de mourir ou plutôt ceux qui ont eût la malchance de revenir.